
Arrêt en gare de Péruwelz. Nous sommes sur la ligne 78 entre Basècles-Carrières et Callenelle. Le chemin de fer est arrivé ici en 1867. La gare de l’époque était modeste, fonctionnelle, simplement. La gare va s’émanciper et devenir internationale. L’infrastructure monumentale d’aujourd’hui date de 1899. (Photos SagaGares-PFT)
La Compagnie des Bassins Houillers du Hainaut, véritable moteur de la percée du rail sur l’axe « Saint-Ghislain-Tournai-Flandre » implante la première gare de Péruwelz en 1867. L’objectif est d’écouler le charbon borain vers la Flandre et le port de Gand, d’alimenter les centres textiles de Leuze, Frasnes, Saint-Sauveur…, de transporter la production des fours à chaux de Basècles. L’axe ferroviaire permet aussi à la main-d’œuvre flamande de s’exporter dans les mines et les entreprises wallonnes. La ligne 78, ouverte entre Saint-Ghislain et Basècles en 1861 par la Compagnie Hainaut-Flandre, est mise en service entre Basècles et Péruwelz le 1 mars 1867. La jonction vers Tournai sera actée le 15 février 1870 par l’Etat belge. Un nouveau bâtiment des recettes, dont la première pierre est posée le 10 octobre 1896, voir le jour en mars 1899 à la nouvelle gare dite « de la Loquette », en remplacement de la première infrastructure située près de la rue de la Buissière où la gare provisoire, en cul-de-sac, est équipée d’un simple baraquement. Péruwelz, reliée à la France par la ligne 92, est devenue une gare internationale.
Le nouveau bâtiment, de style architectural Renaissance flamande, mesure 64 mètres de long et 12 mètres de large. Sa partie gauche, côté Tournai, est réservée au service des douanes qui contrôlait les voyageurs venant de France par la ligne 92 de Somain et d’Anzin. La partie droite, vers Basècles et Blaton, comprend trois salles d’attente de 1er, 2e et 3e classes, les services des téléphone et télégraphes ainsi que ceux des chemins de fer. Le bâtiment sera doté d’un auvent en 1897.
- Ligne 92. Les projets d’une jonction ferroviaire transfrontalière remontaient à 1863. Le 1er mars de cette année-là, le Parlement belge adoptait une loi de concession, la Compagnie de chemin de fer Hainaut-Flandre, d’un chemin de fer entre Péruwelz et la frontière française. Le Hainaut-Flandre allait être repris le 1er janvier 1867 par la Société général d’exploitation des chemins de fer, cédée le 25 avril 1870 à l’Eta belge. La création d’une ligne de chemin de fer entre Péruwelz et Anzin (Fra) voyait de jour dans le même temps, le 18 mars 1870. La ligne 92 belge devenait le prolongement de la ligne française de Somain à Vieux-Condé et frontière. Cette ligne « internationale », dont les origines françaises remontaient à 1835, fut mise en service le 9 août 1874, exploitée en Belgique sur 1,913 km par l’Etat et, en France, par la Compagnie des Mines et du Chemin de fer d’Anzin. Cette ligne Péruwelz-Anzin-Somain, longue de 35 kilomètres, partant de Péruwelz vers la gauche à la sortie de la gare vers Tournai, passait par une quinzaine de gare, dont Vieux-Condé, Anzin, Valenciennes, Denain, Abscon. L’expédition par voie fluviale se faisait par les rivages de la gare d’eau de Denain. L’axe allait devenir fondamental pour le transport de houille extraite du bassin anzinois. La ligne, du « nom » de « 92 », assurera, en plus des nombreux convois de charbon du très prospère bassin du Nord-Pas-de-Calais, quatre trains de voyageurs pendant les jours ouvrable jusqu’au 16 avril 1963. Les convois de marchandises continuèrent à transiter par là pendant encore une dizaine d’années. Les charbonnages françaises étaient entrés dans une irrémédiable période de déclin. La ligne fut définitivement fermée le 15 octobre 1975, avant d’être démontée en 1978.
En 1912, la gare de Péruwelz est équipée d’un hangar aux marchandises, long de 48 mètres, à la mesure de l’activité économique locale de l’époque. La gare péruwelzienne est équipée de trois voies principales pour les lignes 78 et 92 ainsi que de quatre voie secondaires pour la manœuvre, la desserte des raccordements industriels, le garage des convois de marchandises et l’accès à une plaque tournante, située sur le raccordement Jourdois, qui ne servait qu’aux locomotives des trains français qui y faisaient demi-tour.
A ses grandes heures, la gare de Péruwelz voit transiter des dizaines de milliers de voyageurs, notamment des pèlerins se rendant à Bonsecours, les centaines de wagons en transit et en trafic local pour les entreprises raccordées: en 1892, l’industriel de Roucourt Louis Marlier dispose d’un raccordement privé qui deviendra « Louis Boël Marlier » en 1927, en 1894 arrive l’industriel Delhaye-Cortin dont le raccordement sera toujours utilisé en 1978 par le Compoir des eaux et bières de Pierre Austrate, en 1895 l’entreprise charbonnière de M. Jourdois se connecte à la station péruwelzienne, ensuite, dès 1920, les Ets Midol, les Tanneries Théophile Mazurelle, le Frigofère du Département de l’Industrie du Travail et du Ravitaillement devenu « Omer Vermeersch » en 1928 ainsi que d’autres raccordements via le quai de transbordement avec le tramway dans la rue Ponsart.
Le tram à k’vaux
Un mode de transport nouveau est arrivé à la station de la Buissière le 1er mars 1967. Les voitures sont tractées par des chevaux, deux ou trois en fonction des besoins. D’où le nom de « tram à k’vaux ». Le tramway est un moyen de transport privilégié par les pèlerins et les touristes se rendant à Bonsecours, à deux kilomètres de la station de Péruwelz. Sécurité, rapidité, à moindres frais, et par tous les temps! Il en coûtait 10 centimes pour se rendre de la station à l’église, 25 pour aller jusqu’à Bonsecours. La ligne de tram fut inaugurée le 30 mai 1880. Le 28 janvier 1910 allait naître ne nouvelle société, « Les tramways électriques de Péruwelz et extensions », pour l’exploitation d’une ligne entre Péruwelz et Bonsecours et de Péruwelz (église) à la frontière française. La nouvelle société n’a pas créé la ligne et l’exploitation, concédée aux Labouverie, continua avec des chevaux. La traction chevaline fut remplacée par la traction à vapeur pendant la premier guerre. Les rails, à écartement plus étroit que les 1,440 m du début, furent modernisés. L’après-guerre allait sonner le glas de tram et de ses « k’vaux ».
La « vie intense » de la gare de Péruwelz s’est éteinte progressivement avec celle des charbonnages, avec la fin de l’axe transfrontalier d’Anzin-Somain en 1973, avec la fermeture progressive des raccordements des entreprises locales. Les sept voies des grandes heures ont été ramenées à deux dans le cadre de l’électrification et de la modernisation de la ligne, entre 1979 et 1981. Les anciennes cabines ont été démolies. La courbe d’entrée en gare a été adoucie pour permettre aux convois de les aborder à plus grande vitesse. La ligne électrifiée a été inaugurée le 19 janvier 1982, poussant les derniers raccordements dans l’oubli. L’époque est à l’heure du plan IC-IR. L’ancien bureau des douanes de la gare sera transféré aux services des portes. L’espace des anciennes voies de raccordements libéré servira, notamment, à la construction d’un parking. On voit passer à Péruwelz de longs convois de schiste houiller transitant en provenance des terrils du Borinage, entre Warquignies et la centrale électrique de Ruien.
Aujourd’hui, la gare de Péruwelz est desservie par des trains Intercity (IC), omnibus (L) et aux heures de pointe (P) sur la ligne 78 qui fait la jonction entre Mons, Tournai et Lille-Flandres.
L’intermodalité en gare de Péruwelz permet des correspondances avec les bus des TEC et du réseau français Transvilles.
Le bâtiment de la gare, classé par la Région wallonne en 1982, a été racheté par la ville en juillet 2004. La patrimoine sera ainsi préservé, ses gravures dans la pierre de la façade se souvenant des bureaux des « douanes » et du « télégraphe », du blason de la ville, de la roue ailée, ancien sigle de nos chemins de fer. Toutes les fenêtres sont obturées avec des panneaux représentants les communes de la Wallonie picarde, un très beau clin d’œil aux atouts touristiques de toute la région! Un grand projet de rénovation de l’intérieur du bâtiment devrait se concrétiser à l’été 2025. On devrait y retrouver au rez-de-chaussée, une brasserie, une salle des pas perdus, un espace pour la valorisation du tourisme local, un guichet, et, à l’étage, des espaces pour les associations locales. Le projet est inscrit au budget communal 2024 à hauteur de 6 millions d’euros.









