Basècles, ses lignes, ses carrières


Basècles a longtemps été au centre d’un important tissu ferroviaire nourri pas les entreprises et usines locales. Les carrières, les fabriques d’engrais, de chaux, ont permis aux deux gares de Basècles-Carrières et Basècles-Faubourg d’écrire de belles pages d’histoire ferroviaire!

Nous sommes en 1854. Le maître-carrier à Basècles et Quevaucamps, François-Joseph Sacqueleu, sollicite auprès des autorités, notamment, communales l’autorisation de construire une chemin de fer privé pour lui permettre de transporter les produits de ses carrières, pierres à chaux, chaux et le célèbre marbre noir. Un tissu de rails « privés » va progressivement permettre à l’économie locale de prendre un nouvel élan avec le « Chemin de Fer des Carrières de Basècles ». Dans le même temps, ou presque, la Compagnie Hainaut-Flandre lance les voies de la ligne 78 Saint-Ghislain – Tournai à Basècles, le 21 mai 1861. La section de la ligne 78 vers Péruwelz sera ouverte le 1er mars 1867, la troisième et dernière, vers Tournai, sera exploitée dès le 15 février 1870.
L’Etat belge reprend l’exploitation de la ligne et de ses infrastructures le 1er août 1870. Le point d’arrêt initial pour voyageurs va prendre le nom de « Basècles-Carrières ». La gare privée de la S.A. « Chemin de Fer des Carrières de Basècles » construite et exploitée par la « Société Bernard-Trivier, Ch. Vincent Fils et Cie » est reliée au réseau public. Les produits des carriers et marbriers locaux, Roland, Pourbaix, Bernard, Berchet, Legrand, Delfosse… y transiteront désormais. Basècles-Carrières, qui sera gare de troisième classe en 1950, est dotée d’une infrastructure à la hauteur de ses ambitions: le bâtiment principal est composé d’une partie avec étage, pour le logement du chef de gare, de deux ailes dont une à toit plat, l’autre servant de hangar aux marchandises avec une marquise, d’une rampe de chargement, d’une faisceau de marchandises et de voies de cour, de plusieurs loges techniques, d’une cabine, d’une maisonnette pour le garde-barrière, de deux jardins… En 1945, la station reçoit un personnel conséquent pour gérer, notamment, les flux de marchandises: un chef de gare, deux sous-chefs, deux chargeurs-manœuvres, deux garde-barrières, un porteur de dépêches.
Les deux guerres mondiales, plus tard, l’avènement du béton et des engrais chimiques face à la chaux agricole pousseront progressivement le tissu économique local vers la disparition. Basècles-Carrières sera fermée aux marchandises en 1987, la gare retrouvera son statut de point d’arrêt pour voyageurs de ses origines, le bâtiment des recettes sera démoli en septembre 1985 laissant la place à de simples aubettes. Le trafic « voyageurs » sera supprimé le 26 septembre 1993.

Basècles-Faubourg

Le chemin de fer à Basècles se situe au croisement des lignes 78, Saint-Ghislain – Tournai, et 86 entre Basècles-Carrières et De Pinte via Thumaide, Tourpes, Leuze, Grandmetz, Frasnes-lez-Anvaing, Ellignies, Anvaing, Derneau, Audenarde et Renaix. Une gare, plus proche du village, sera construite dans le quartier du Faubourg, qui lui donnera son nom, alors que la Compagnie Hainaut-Flandre développait le trafic ferroviaire en mai 1861. Le bâtiment des voyageurs était initialement équipé d’une partie à étage, ensuite réduit à un plain-pied avec marquise.
Les « Engrais Battaille » (« Octave Battaille et Fils » en 1911, « Sté Battaille Frères » en 1927…) furent parmi les premiers à se raccorder au rail à Basècles-Faubourg. La gare allait progressivement desservir les plus importantes fabriques de bonneterie du pays, de nombreuses filatures, des moulins, des fabriques de sucre, d’engrais: notamment, la briqueterie Candireu (1874), les Charbons Saffre-Ponchelet (1886), les Engrais chimiques Auguste Dubrunfaut (1918-1958)… Les chiffres indiquent encore que 3.873 wagons y transitaient en 1934, 5.300 en 1936!.. La station employait dès lors un personnel conséquent, chef de garde, deux sous-chefs, deux gardes-barrières, un porteur d’avis. « Battaille » devra toutefois affronter la sortie de guerre, la montée de la concurrence, l’évolution du secteurs agricoles, des produits nouveaux. En 1990, la SNCB ne dénombre plus que 262 wagons arrivée et expédiés… Le raccordement « historique » devait être supprimé, le 25 septembre 1994 « par manque de trafic ». La gare allait, plus tard, être rasée. La section entre Basècles-Faubourg et Leuze, sur la ligne 86, sera fermée aux voyageurs en 1985, le tronçon « marchandises » de 1,7 kilomètres entre le Faubourg et Basècles-Carrières suivra en 1992. La SNCB fermera ensuite le tronçon entre Renaix et Leuze en 1988, en raison de la faible fréquentation des voyageurs. Tout trafic sera supprimé entre Renaix et Frasnes-lez-Anvaing en 1998, entre Frasnes et Leuze en 2006.

La modernisation des chemins de fer va apporter de profond changements à Basècles. La construction de l’autoroute E19/E42 au début des années 1970 déplacera la bifurcation de la ligne 86, l’électrification de la ligne 80 rectifiera la courbe de Basècles pour donner de la vitesse aux convois. La restructuration dans le cadre du plan IC-IR de 1984 a fini le travail. Un Ravel a remplacé la voie entre Leuze et les carrières. L’histoire ferroviaire s’y vit autrement…

Bertha, la grosse ou.. pas?

Nombreux furent les Basèclois qui affirmèrent, en 1918, avoir vu à deux repsies une « Grosse Bertha », redoutable canon à longue portée (12,5 kms pour des obus de 800 kgs). Les occupants acheminèrent, certes, par le rail une pièce d’infanterie longue de 10 à 12 mètres et d’un diamètre intérieur de 200 à 250 mm. L’engin était monté sur plate-forme dotée de plusieurs trains de roues, il disposait de sa propre locomotive et de wagons de munitions spécifiques. Certains spécialistes ont évoqué une pièce française prise à l’ennemi.
L’engin s’est souvent retrouvé à Basècles où les soldats allemands avaient remonté l’ancienne courbe reliant la station de Basècles-Faubourg à l’« Aubette de Onze Heures ». Une courbe avait, en effet, été créée en 1867 pour relier « Faubourg » à Péruwelz ainsi qu’au Tournaisis. Ladite course fut vite démontée, en 1870, quand une nouvelle ligne de l’Etat permit aux Baséclois de rejoindre Tournai via Basècles-Carrières. L’éphémère triangle ferré recréé par l’occupant pouvait ainsi permettre aux Allemands de dissimuler le canon sous les arbres et de le déplacer à leur guise pour alterner les angles de tir. En terrifiant les populations locales.