Nimy-gare, ses tubes, ses faïences et son Bon Grain


La gare de Nimy était située sur la ligne 118 créé par la Compagnie privée du Centre, un axe important entre les bassins houillers du Borinage et de Charleroi, via la région industrielle du Centre. La ligne avait pour vocation de relier les gares de l’Etat de Mons et de Manage. Nimy est la première station après Mons. Les voies d’eau sont toutes proches. La multimodalité encourage l’économie.

La ligne ferroviaire de Mons à Manage a fait partie de la première vague de concessions de chemin de fer privées réalisées en Belgique. Cette concession, qui comprenait aussi la ligne Namur – Liège (actuelle ligne 125) fut adjugée le 20 juin 1845 à la Société des chemins de fer de Namur à Liège et de Mons à Manage avec leurs extensions. Cette ligne a été mise en service entre 1848 et 1849.

La ligne numérotée 118 a connu un trafic important, compte tenu de sa situation. Le trafic des marchandises et des voyageurs y était très dense, notamment grâce à l’apport du transport des travailleurs des nombreuses entreprises voisines des différentes gares entre Mons et La Louvière. A la sortie de la gare de Mons, l’axe se sépare de la ligne 96 vers Bruxelles et prend la direction de la région du Centre en direction de Manage et, plus loin, de La Louvière et de Charleroi.

La gare de Nimy a été mise en service le 1er juin 1849. L’architecture de la gare avait oublié les « escaliers » des redents du style néo-Renaissance flamande pour privilégier la sobriété les lignes droites. Le bâtiment des recettes était composé de cinq travées avec des fenêtres arrondies, un étage pour l’habitation du chef de la station. Une longue marquise équipait le premier quai. La gare bénéficiait également d’un hangar et d’une vaste cour aux marchandises à deux voies, d’une imposante rampe de chargement et d’un petit faisceau de marchandises qui permettait la manœuvre des wagons des quatre entreprises locales. A côté du bâtiment principal se trouvait le Block 21 de type Siemens qui commandait la signalisation et le passage à niveau que croisait, entre autres, les rails de la ligne vicinale de Mons à Casteau. Ce passage, gardé, était équipé d’une demi-barrière qui n’était ouverte que lorsque le tram devait croiser les deux voies de la ligne de l’Etat. Ce passage à niveau sera remplacé dans les années 40 par un pont. Il a été supprimé le 26 août 1979 après la mise en service du block automatique entre Mons et Obourg.

Aujourd’hui, le bâtiment principal de la gare et la hangar aux marchandises ont disparu. La rampe de chargement rappelle le passé ferroviaire du lieu. Deux aubettes en béton abritent les voyageurs de l’actuel point d’arrêt non-gardé de Nimy. Des entreprises jadis raccordées à la gare, il ne reste que des vestiges, comme l’énorme hangar de Tubel que les artistes taggeurs ont investi: les murs ont été décorés avec des grandes fresques multicolores. Le lieu est devenu un site bien connu des amateurs d’urbex. Les objectifs des photographes ont succédé aux tubes des lamineurs.

Raccordements privés

Plusieurs raccordements privés sont progressivement venus se connecter à la station de Nimy

La Fonderie Auguste Sturbois (1898), qui deviendra les S.A. Aciéries de Nimy en 1944, en face du bâtiment principal de la station; le raccordement sera fermé en 1971;

Le raccordement de la S.A. des Forges, Fonderies et Laminoires de Nimy était situé à une centaine de mètres de la gare en direction du Mons; la société a évolué en S.A. des Tubes de Nimy, devenue Tubel Nimy en 1981 (l’entreprise fusionnera avec les tubes de Jemappes en 1990; elle sera reprise par une société métallurgique de Longtain en 1992. Tubel Nimy effectuait des activités de laminage/décapage et s’est concentrée sur la fabrication de tubes en acier; l’entreprise exportait à ses grandes heures sa production vers l’Allemagne, la France, les Pays-Bas, le Luxembourg, les Etats-Unis; l’entreprise a cessé ses activités le 1er septembre 1997; les produits finis étaient transportés soit par camions soit par trains tractés par une locomotive de l’usine vers la gare de Nimy le raccordement fut fermé en 1990. Le site Tubel Nimy a été abandonné en 1998 après le déménagement des activités. Seul l’ancien hall de laminage et de décapage est toujours visible. Le lieu est très prisés par les artistes tagueurs et les amateurs de photos « urbex ». une demande de permis a été introduite pour la construction d’une centrale photovoltaïque de 26.100 panneaux solaires produisant 6,6 MWh. (https://archives.wallonie.be/ark:/44119/n3r8j2zqt109)

La Société du Charbonnage de Strépy-Bracquegnies avait établi le raccordement de ses magasins à charbon en 1863 en face de la gare; cette desserte fut utilisée dès 1905 par l’entreprise alimentaire Le Bon Grain; le raccordement a été fermé en 1959. La SA « Le Bon Grain » était une œuvre philanthropique basée sur la tolérance et dont les « bienfaits étaient accessibles à tous à quel que parti qu’il appartienne. »

Le raccordement de Chaudronneries Lebrun (1902); l’entreprise devient SA des Ateliers Lebrun en 1932; le raccordement fut fermé en 1972. L’entreprise, créée par l’industriel Bruno Lebrun, a été pionnière de l’industrie du froid, mettant au point les premières machines frigorifiques, soit les premiers compresseurs destinés à produire du froid. Près de 150 ans plus tard, Lebrun est toujours leader sur les marchés de la pharmacie, la chimie et l’aéronautique, grandes consommatrices de températures basses. Aujourd’hui, Lebrun appartient au groupe Alvest, fournisseur de services pour l’industrie aéronautique.

La Faïencerie de Nimy disposait quant à elle de sa propre locomotive, agréée par les chemins de fer, pour effectuer la manoeuvre de ses wagons sur son raccordement ainsi qu’en voie principale dans la station-même. La « Faïencerie Royale et Impériale de Nimy » fut raccordée au chemin de fer dès l’ouverture de la ligne en 1849 et jusqu’en 1951. La matière première partait du Canal du Centre par  rail vers l’entreprise via la place de Nimy. La faïencerie, jadis implantée sur la Place de Nimy, était la société de fabrication de faïence la plus ancienne de Belgique. Fondée en 1789, elle a cessé ses activités en 1951. La production de faïence à Nimy est connue sous l’appellation « Vieux-Nimy ». Le Musée du Vieux Nimy – carrefour de la céramique, situé sur la Place de Nimy, expose les réalisations les plus intéressantes de la Faïencerie de Nimy ainsi que d’autres manufactures de porcelaine de Belgique et du Nord de la France. On ajoutera que Nimy a vu naître des piperies de terre: une riche collection de pipes en terre est exposée au musée du Vieux Nimy. (https://museedenimy.apollineledune.be/)